[Le Portrait du mois] Flavie responsable de projets chez Frères des Hommes

Depuis plus de quatre ans, Flavie gère pour Frères des Hommes nos projets de transformation sociale au Sénégal, au Rwanda, en RDC, au Pérou, en Haïti et en Inde. Véritable catalyseur de la relation partenariale, elle facilite le lien entre financement et action concrète. Avec la poursuite du projet « Récasé » que nous menons avec nos deux partenaires rwandais, Duhamic-Adri et Adenya, c’est l’occasion pour elle, de revenir sur son accompagnement.

Depuis combien de temps tu travailles avec Duhamic-Adri & Adenya sur le projet « Récasé » ?

Ça fait 4 ans que je travaille chez Frères des Hommes et environ 3 ans que je travaille sur le projet Récasé. La première phase a commencé en 2017 et a duré 4 ans, et je l’ai suivi tout le long de la deuxième phase. J’ai pu me rendre trois fois en missions au Rwanda.

©Frères des Hommes, équipe du projet Récasé

Quelle a été ta plus grande surprise par rapport au contexte socio-politique en comparaison au nôtre ?

J’étais assez surprise de la problématique de malnutrition, car quand on découvre le pays on a une image « de pays riche » par rapport à cette zone de l’Afrique. Mais lorsqu’on va dans les villages, on se rend compte que c’est un vrai problème, notamment à cause des politiques publiques qui encouragent l’utilisation de pesticides. Le gouvernement rwandais veut développer une agriculture expansive, avec l’utilisation de beaucoup d’engrais chimiques, et pour ça, ils versent des aides aux paysans. Cela va à contre-courant des politiques actuelles de préservation de l’environnement et de la santé.

Quel fut ton meilleur souvenir de toutes ces missions passées au Rwanda ?

J’ai plusieurs souvenirs forts. Notamment lors ma première mission, qui se passait post-covid, où on devait se faire tester toutes les 48h, et où on a assisté à un temps fort avec la vaccination des petits porcs.

Quelle a été ta/tes plus grande(s) réussite(s) sur le projet Récasé ?

C’est difficile à dire, car ce sont des réussites collectives ! Je mettrais en avant le fait qu’on ait réussi à mener le projet jusqu’au bout. En effet, il y a eu des changements au sein de l’équipe projet et il a fallu recréer un équilibre, notamment après le départ de Fidèle qui était coordinateur des projets avec Frères des Hommes jusqu’à fin 2023.

Quelles actions ont été mises en place pour cette deuxième phase du projet ?

Toutes les actions qui étaient prévues ont été mises en place, avec notamment :

  • Les formations : des techniques d’élevage et d’agroécologie, sur la gouvernance (pour mener à bien la structuration et le fonctionnement des coopératives), en nutrition et planning familial et en alphabétisation. Que ce soit les formations à destination des paysans animateurs de proximité ou les membres des collectifs directement.
  • Le renforcement des collectifs que ce soit sur leur gouvernance, ou la participation des jeunes.
  • Le renforcement des équipes du projet.
  • La sensibilisation dans les écoles, autour de la nutrition.
  • La mise en place de jardin-potager avec une sensibilisation en agroécologie
  • Les actions collectives communautaires, définies par les membres de la communauté au profit de la communauté.
  • La mise en œuvre des jardins-collectifs en production maraîchère pour la consommation et la revente, notamment avec les pépinières et la distribution de plants d’arbres fruitiers et maraichers.
  • La démultiplication du petit bétail tout le long de la phase qui a permis à un grand nombre de membre d’en bénéficier et donc de générer des bénéfices par la suite.


©Frères des Hommes

Quels impacts concrets as-tu observés sur les collectifs paysans ?

On voit que les collectifs sont beaucoup plus structurés, que chaque membre ose plus prendre sa place grâce aux différentes formations. On observe aussi un meilleur roulement des membres avec notamment l’entrée de femmes dans les bureaux. Ils bénéficient aussi d’une meilleure reconnaissance auprès des autorités locales grâce aux actions mises en œuvre. Cette reconnaissance permet d’assurer leur pérennité sur le plan juridique.

©Frères des Hommes

Comment les organisations rwandaises participent au collectif Former Pour Transformer ?

Les équipes de Duhamic-Adri et Adenya ont participé à tous les espaces du collectif ! Par exemple, sur les questions d’alphabétisation, ils ont participé à des échanges avec Concept et l’UGPM qui ont l’habitude de réaliser ce type d’activité. La mise en commun a été très enrichissante pour le projet Récasé : les apprentissages ont été réinjectés dans le projet.
De même pour la participation avec des sessions d’échanges de pratiques qui ont permis de coproduire un guide de formation sur la participation qui permet aux animateurs.trices de comprendre ce qu’est la participation et de mieux la favoriser malgré les facteurs limitants qu’on peut retrouver au niveau local.

Depuis 2021, quels changements sur la participation des populations avez-vous (FDH et ses partenaires) pu observer ?

Ce qui ressort des membres des équipes, c’est que la participation est beaucoup plus importante qu’avant notamment grâce aux outils développés au niveau du Collectif Former pour Transformer sur la participation. Il y a plus de réflexions au sein des collectifs paysans.
Toutefois, ce constat est à relativiser. On sait que les enjeux politiques empêchent une totale liberté dans l’émergence d’activités participatives : celles-ci sont encadrées par certaines règles. Par exemple, pour les actions collectives communautaires, c’est une enveloppe à destination des collectifs qu’à priori eux décident. Mais finalement, ce qui a été choisi, ce sont des actions qui sont incitées par l’Etat rwandais. Même si elles sont bien évidemment nécessaires, il n’y a pas une réelle liberté pour que les populations proposent de nouvelles activités.
Le projet est alors très bien accueilli par les autorités ! Il vient combler certaines lacunes et permet de faire reconnaître les collectifs comme acteurs du développement au niveau local.

Quelles seront les nouveautés pour la troisième phase du projet ?

Même si on ne sait pas encore quand elle démarra, on sait qu’elle portera sur l’autonomisation des collectifs en rajoutant des nouveaux focus notamment autour de la jeunesse. L’idée serait de créer des groupes de jeunes pour développer des nouvelles activités génératrices de revenus autour de l’agroécologie. L’enjeu réside dans leur intégration et leur mobilisation pour qu’ils.elles deviennent des acteurs de développement local !
Aussi, on souhaiterait constituer des groupes de paysans-paysannes expérimentateurs de nouvelles pratiques agroécologiques ! Les résultats pourraient seraient ensuite réinjectés dans les formations et dans du plaidoyer au niveau local.
Il y aura également des nouvelles formations pour s’ajuster au contexte, notamment avec le changement climatique et la question de genre, axes qui jusqu’alors étaient encore trop peu développés.


« Récasé » accompagne depuis 2017, des milliers de paysans et paysannes de la région de Butaré. Grâce à l’évaluation complète de cette deuxième phase, nous avons pu dresser le bilan des forces et des améliorations de notre projet. Un grand merci à l’AFD, à la Wallonie Bruxelles International (WBI) via Frères des Hommes (Belgique), à la générosité du public, aux équipes de nos deux partenaires rwandais ainsi qu’aux membres salariées de Frères des Hommes qui portent et mènent ce projet depuis maintenant plus de 7 ans. Urakoze ! (merci en kinyarwanda).