A l’époque, la réponse de l’Union des Groupements Paysans de Méckhé (UGPM) a résidé dans la mise en place de « groupements » de paysans, qui sont à la base de son action. Ils sont actuellement au nombre de 76 dans 89 villages, soit plus de 5 000 membres parmi lesquels 61% de femmes. Le projet mené avec Frères des Hommes de 2013 à 2015 visant à soutenir la transformation et la commercialisation de l’huile d’arachide a participé à la construction de ces collectifs.
Dans le groupement s’opèrent toutes les activités collectives de l’UGPM
Le groupement est au cœur de la vie du village. Il accompagne les familles, participe à la gestion des ressources du village, organise des actions de sensibilisation, informe les membres (par exemple sur les innovations techniques, les politiques agricoles nationales, etc.). Il est enfin la courroie de transmission entre l’UGPM et le terrain. L’UGPM se nourrit des informations que lui transmettent les groupements, pour sa propre stratégie mais aussi dans une perspective de plaidoyer au niveau national. « L’information que nous font remonter les groupements, témoigne Ndiakhate Fall, directeur de l’UGPM, sur leurs difficultés, leurs avancées, sont transmises à la Fédération des ONG sénégalaises, qui peut ainsi baser son plaidoyer sur des informations en direct du terrain. Nous sommes ainsi en position pour dire aux autorités si telle ou telle politique fonctionne ou non. »
Se positionner comme interlocuteur de l’État
Il poursuit : « On ne peut pas dire que l’État n’essaye pas mais cela est fait sans concertation avec les acteurs concernés. »Parfois les choix de l’État vont à l’encontre des intérêts des paysans. Les accords de partenariat, notamment entre le Sénégal et l’Union européenne ont ainsi conduit à faire rentrer les produits européens dans le marché national au détriment des produits locaux. « Il y a eu une période où on avait ouvert le marché sénégalais aux cuisses de poulet venant de l’extérieur, dit Ndiakhate,le kilo de cuisse de poulet coûtait moins de 2 euros, alors que le kilo de poulet local coûtait 4 euros. À cette époque tous les aviculteurs de la région avaient cessé leur activité car ils ne pouvaient pas faire face à la concurrence. » La conséquence est que beaucoup de jeunes paysans sont contraints d’aller à Dakar chercher du travail ou d’émigrer dans d’autres pays africains ou en Europe. 80% des émigrés viennent du milieu rural. C’est là tout le défi de l’UGPM, maintenir le lien à la terre en consolidant la solidarité paysanne, en valorisant la production locale et en se positionnant comme interlocuteur de l’État.