Un coup d’état institutionnel et anti-démocratique qui ne respecte pas la volonté de 54 millions d’électeurs
12 mai de 2016
Le mouvement des travailleurs ruraux sans terre (MST) s’oppose à la décision du Sénat fédéral brésilien, de ce jeudi (12), d’autoriser le processus d’impeachment (destitution) contre la présidente Dilma Roussef et de sa mise à l’écart temporaire de la présidence. Nous sommes convaincus, comme l’affirme le texte de la procédure, que la présidente n’a commis aucun crime lié aux maquillages des comptes publiques. Si cela était le cas, la procédure devrait également concerner son vice-président, Michel Temer, qui remplace Dilma Roussef, ainsi que le sénateur Antonio Anastasia, de l’état du Minas Gerais.
C’est un coup d’état institutionnel et anti-démocratique qui ne respecte pas la volonté de 54 millions d’électeurs et est initié par les secteurs les plus conservateurs de la société, en particulier le patronat néolibéral soumis aux intérêts des entreprises étasuniennes. Un coup d’état soutenu par une campagne permanente des grands groupes de presse – en particulier, le réseau Globo – qui ont couvert la situation de manière totalement partiale, ce à quoi il faut rajouter l’attitude arbitraire du pouvoir judiciaire.
Ce coup d’état autorisé par le Sénat n’a pas respecté le résultat des urnes et le choix de la chef d’État, mais, comme annoncé par son vice-président usurpateur, mettra en place un programme régressif, néolibéral, qui rappelle de tristes souvenirs pour le peuple brésilien que sont les gouvernements Collor et Fernando Henrique Cardoso. Le gouvernement de Michel Teme sera anti-populaire et marquera une régression sociale qui plusieurs fois a été refusé par la majorité de la population dans les urnes. Les élites brésiliennes incapables de cohabiter avec la démocratie et de se soumettre à la volonté populaire ont écarté la présidente sans aucune preuve de crime, pour favoriser leur projet de coupe budgétaire dans les secteurs sociaux, de chômage et de privatisation.
Le « chemin vers la récession » du putschiste Michel Temer accentuera davantage la crise sociale et économique et amplifiera l’instabilité politique du pays. Le nouveau gouvernement qui s’annonce, par son parcours historique, ne représente pas une rupture avec les pratiques de corruptions que nous avons tous dénoncées dans les rues. Nous espérons que le Sénat revienne sur sa décision lors du prochain vote. Et si cela n’arrive pas, les forces démocratiques et opposées au coup d’état doivent saisir la Cour Suprême. La société brésilienne sait que nous traversons une crise économique, politique, sociale et environnementale. Cette crise ne sera pas surmontée avec des coups d’état. Elle a besoin d’un large débat au sein de la société brésilienne qui rassemble la majeur partie des forces populaires et sociales, pour construire un nouveau projet de pays qui soit en capacité de surmonter les crises.
Face à la crise politique instaurée, nous affirmons avec tous les mouvements populaires, que seule une reforme politique profonde qui rendra au peuple le droit de choisir ses représentants légitimes peut être une véritable solution. L’actuel congrès n’en a pas les conditions, ni la volonté politique. C’est pourquoi il faut que le Sénat approuve la mise en place d’un référendum, qui donne au peuple le droit de choisir une assemblée constituante, débouchant sur une reforme politique avec l’organisation d’élections générales dans des conditions démocratiques.
Le MST restera mobilisé pour défendre la démocratie et des droits sociaux, aux côtés du Front Brésil Populaire et des milliers des travailleurs et travailleuses qui n’accepteront pas le coup d’état. Nous continuerons la lutte contre les grands latifundiaires et l’agrobusiness, pour la réforme agraire populaire et pour le droit constitutionnel de tous les travailleurs ruraux d’avoir accès à la terre et à une condition de vie digne à la campagne.
Coord. nacional du MST
brasilia, 12 de maio 2016
http://www.mst.org.br/2016/05/12/nota-do-mst-sobre-afastamento-da-presidenta-dilma-roussef.html