Quel est le contexte politique alors que des élections locales et nationales sont prévues ?
Vous savez, la RDC s’était vraiment inscrite dans un processus de démocratisation, avec l’élection présidentielle de 2006, transparente, comme on l’a prétendu. Pour nous aussi, l’APEF, c’était un grand enjeu. Au regard de toutes les revendications des femmes, ne serait-ce pas mieux que nous puissions aussi nous lancer dans la vie politique ? C’est à ce moment-là que Zita Kavungirwa (ancienne présidente de l’APEF) a posé sa candidature à la députation nationale. Moi j’ai joué le rôle de la directrice de campagne. L’objectif pour l’APEF c’était de peser au niveau des instances de décision. C’était vraiment notre objectif. Nous avons aussi donc mené une campagne de formation, de sensibilisation sur la question des élections. Il y avait même des femmes qui dans les associations avaient pris la décision, vraiment, de se présenter comme candidates dans des élections provinciales. Il ya aussi eu des élections en 2011. C’était un processus. Tous les 5 ans on vote. 2016 est une année où il y aura encore l’organisation des élections présidentielles et législatives et aussi les élections communales, municipales. Il y a encore des discussions par rapport à l’organisation de ces élections. Tantôt, on nous parle du financement, tantôt on nous parle de l’organisation d’un dialogue national mais avec le risque que Laurent-Désiré Kabila, le président actuel, se représente.Ça, vraiment, c’est notre crainte.
Vous pensez qu’il se représentera même si la constitution lui interdit un 3ème mandat
C’est l’impression qui se dégage. Quand on fait la lecture de tout ce qui se passe, nous nous posons la question d’abord, en tant qu’organisation de la société civile, de pourquoi on veut organiser le dialogue national ? La question d’organiser avant un gouvernement d’union nationale qui rassemble toutes les tendances politiques est la plus importante. Notre constitution prévoit un mandat de 5 ans renouvelable une fois. Laurent-Désiré Kabila avait été élu une première fois en 2006 puis réélu en 2011 et tout se passe pour qu’il puisse aussi se représenter une troisième fois. C’est pour cela qu’il y a des personnes aujourd’hui qui ont pris la décision de quitter le gouvernement ou de démissionner même si elles étaient très proches de lui. Parce qu’ils comprennent es risques si il se représente pour la troisième fois. Je prends le cas de Pierre Lumbi (fondateur et ancien secrétaire de Solidarité Paysanne, une ONG congolaise), c’était vraiment la première personne qui est venu dans la région avec l’idée de créer des associations. C’était un militant engagé. Il travaillait même à l’époque avec Frères des Hommes. Et puis même nous, nous sommes une émanation de cette organisation. C’est que nous partageons quelques valeurs communes avec lui. C’est le cas aussi du ministre du Plan (Olivier Kamitatu) qui a aussi démissionné et ainsi de suite. Puisque Pierre Lumbi était le conseiller spécial du chef de l’Etat en matière de sécurité, posez-vous des questions : pourquoi a-t-il pris la décision de démissionner ?
Vous pensez que si Laurent-Désiré Kabila modifie la constitution et se représente, il y a un risque de guerre civile ?
Oui. On ne veut pas qu’il y ait de guerre civile encore au Congo. On risque de se retrouver encore dans la même situation qu’en 1996. Mais néanmoins si la population résiste, peut-être que les choses ne vont pas marcher, c’est ce que nous souhaitons. Parce que vraiment on sent que quelque chose bouge et cette résistance je le sens encore beaucoup plus ici au Sud-Kivu. S’il faut vraiment être vraiment en bon terme avec toutes les couches de la population, il faut parler d’organiser des élections en 2016 et non pas de ce dialogue national qui est proposé.