Des besoins ressentis et exprimés par les familles paysannes
Si les formations à l’hygiène, la nutrition et la planification familiale ont été pensées au début du projet Récasé, c’est d’abord suite à une enquête sociale réalisée auprès des familles paysannes. Odile peut en témoigner : « On a fait le constat que beaucoup d’entre elles vivaient dans de mauvaises conditions d’hygiènes, il y avait des maladies diarrhéiques, des verminoses, et puis aussi des questions sur la nutrition. On leur demandait combien de fois ils mangeaient de la viande, ils répondaient que c’était exceptionnel. Dans la composition de leurs repas, on voyait qu’ils n’avaient pas de connaissance sur la composition idéale d’un repas. On a constaté de grands problèmes à ce niveau-là, comme au niveau de la planification familiale. Les ménages les plus pauvres sont ceux qui ont le plus d’enfants, car le niveau de prise de décision, de prise de conscience, et le niveau d’éducation est souvent minimal, donc il fallait traiter ces soucis. »
Pour Odile, l’hygiène, la nutrition et la planification familiale vont de pair : une mauvaise hygiène entraîne une mauvaise santé, aggravées par une alimentation non équilibrée et carentielle : « Je vois que ces thématiques sont pertinentes, surtout pour les ménages vulnérables car ici au Rwanda, ils vivent dans des conditions d’hygiène inadéquates. Quand ils vivent dans ces conditions, qu’ils ont des maladies, c’est difficile d’avoir une force de travail et de rapporter à manger à la maison. Leur vulnérabilité vient notamment du fait qu’ils n’ont pas suffisamment de terres, alors que l’agriculture est leur principale activité. Donc il faut faire en sorte qu’ils soient toujours en bonne santé, et qu’ils soient conscients de cette nécessité. Sans bonne santé ils ne peuvent pas travailler. »
Odile Mujawamariya lors de l’un de ses ateliers de sensibilisation
Une formation en cascade
Comme pour l’ensemble du projet Récasé, l’équipe se mobilise pour proposer de actions de sensibilisation et des formations en cascade : l’équipe projet est formée, puis elle forme elle-même les paysans animateurs formateurs, aussi appelés PAFOs, présents dans chaque Organisation communautaire de Base (OCB). Les formations à l’hygiène et à la nutrition n’ont pas fait exception : « J’ai commencé par sensibiliser les leaders de ces organisations communautaires sur les thématiques hygiène, nutrition et planification familiale. L’objectif était de provoquer une prise de conscience et de leur donner des connaissances pour qu’ils puissent sensibiliser à leur tour leurs membres. A un moment donné on a introduit des PAFOs, et parmi eux il y a un groupe chargé des questions d’hygiène, nutrition et planification familiale : je les ai également formés. »
Les formations des PAFOs se sont organisées méthodiquement : après les apprentissages théoriques, il s’est agi de planifier leurs interventions : « Après la formation on a fait la planification des actions de nutrition (les actions de sensibilisation, de suivi de la mise en pratique dans les ménages...) Ils sont maintenant en action. Les PAFOs agissent q avec les leaders des OCB qui sont responsables de la vie générale de l’organisation, et la sensibilisation fait partie de leurs actions. Je les ai invités pour adapter et améliorer la planification pour que les deux parties se l’approprient. Nous prévoyons aussi de faire des ateliers bilans, pour faire le point, voir quels problèmes ils ont pu rencontrer, quelles solutions ils ont su apporter, ce qu’il reste à faire… Nous allons faire cela avec toutes les organisations accompagnées par le projet. »
Sensibiliser les jeunes
Le projet Récasé prévoit également un volet de sensibilisation des jeunes à ces thématiques : « Je travaille avec les clubs nutrition de 32 écoles dans les trois zones du projet. Nous avons 32 écoles que nous sensibilisons, on travaille avec une trentaine d’élèves membres de clubs hygiène, on les sensibilise sur l’hygiène, la nutrition et sur la santé de la reproduction. Je travaille directement avec les jeunes du niveau secondaire, ils vont de 12 à 18 ans. »
La thématique de la planification familiale sous-tend un enjeu important pour les jeunes femmes au Rwanda. Comme l’explique Odile, leur situation économique et sociale peut provoquer une aggravation de leurs vulnérabilités : « L’idée de faire de la sensibilisation sur la santé de la reproduction c’est de les aider à bien réfléchir. Elles apprennent quelques notions de biologie à l’école mais ce n’est pas suffisant car les écoles manquent de temps. La prise de conscience doit être renforcée pour que les jeunes filles puissent se dire que des comportements à risque peuvent aggraver une situation de pauvreté. Pour que les jeunes puissent dire "Non" quand il faut savoir dire "Non." »
S’adresser aux plus jeunes, c’est aussi participer à leur éducation primaire, comme Odile le développe : « Si tu éduques les plus jeunes, tu es sûre que la société de demain sera meilleure. Ils grandissent avec de bonnes pratiques qu’ils vont répéter à leurs frères et sœurs ! Ils portent bien les messages ! »
Ces formations aux jeunes ne font que commencer, mais c’est par la discussion et le dialogue ouvert qu’Odile compte accompagner les jeunes et les populations paysannes vers un quotidien sain, équilibré, et capable de soutenir leurs plus grandes ambitions !