Le choix de
Edito
Un collectif qui nous transforme
A l’occasion du « PANORAMA 2023 » mettant en lumière nos réalisations de l’année, j’aimerais vous parler de notre Collectif Former pour Transformer
qui impacte chacune de nos actions.
Impulsé par Frères des Hommes, il rassemble des organisations de la société civile du monde entier. Notre ambition commune ? Contribuer à la participation de toutes et tous à des actions solidaires et au changement social, sans distinction d’âge, de métier, de sexe, de couleur de peau, de formation, de pouvoir économique. « Chaque partenaire accompagne les populations à devenir des acteurs de changement. Le changement ne peut pas être fait sans les populations : c’est avec elles, pour elles et par elles. Le travail du Collectif Former pour Transformer réside dans le renforcement et la mise en application des priorités qu’on a définies ensemble » indique Juslène, référente Former pour Transformer au sein du Mouvement Paysan Papaye en Haïti.
En 7 années, Former pour Transformer s’est métamorphosé. À la suite de l’élaboration d ’une vision politique commune, qui s’articule autour de 6 priorités pour la transformation sociale, les organisations membres ont joué le jeu de la co-construction. La méthode est la suivante : renforcer son organisation tout en favorisant le partage et l’essaimage auprès des autres membres. Pour Yvette, animatrice à l’APEF : « Dans ma posture d’animatrice, je me suis inspirée des pratiques d’autres organisations membres du Collectif Former pour Transformer pour améliorer l’accompagnement de nos groupes cibles : les outils et techniques d’animation, les méthodologies, l’Atelier de la Transformation Sociale, les actions permises par le fonds de participation ». Les échanges permettent d’outiller les équipes de chaque organisation, dont Frères des Hommes. Nos ressources sont toutes en accès libre sur le site de l’Atelier de la Transformation sociale (www.atelier.fdh.org). Je vous invite à aller les découvrir.
Les expériences du Collectif Former pour Transformer résonnent aussi en France. Dans le 18ème arrondissement de Paris par exemple, les actions solidaires menées avec les jeunes migrants ont été inspirées de l ’association CONCEPT, au Sénégal, qui a accompagné des initiatives collectives citoyennes de jeunes artisans et artisanes.
Former pour Transformer bouleverse radicalement les rapports partenariaux Nord-Sud. Ce que nous vivons fait écho aux débats sur la décolonisation de l’aide au développement. En effet, les dynamiques que nous accompagnons et qui nous traversent visent à lutter contre les rapports de domination sur les territoires, dans nos organisations et au sein même du Collectif. Pour ce faire, l’animation et la gouvernance sont de plus en plus partagées et l’éducation populaire nous inspire.
Nous espérons que les nouvelles voies d’actions empruntées par Frères des Hommes résonnent aussi chez vous. Qu’elles vous aident, dans votre quotidien, à vous relier.
Chaque avancée, chaque réussite dans nos projets est possible grâce à votre soutien. Donatrices, donateurs, nous vous remercions de la confiance que vous nous témoignez chaque année.
INDE & pérou
Voyage d’échange : renforcer les liens pour agir ensemble
En 2023, les liens entre nos partenaires n’ont cessé de se renforcer ! Au mois d’août, Ganga et Bipin, de Fedina, notre partenaire indien, se sont rendus à Lima, au Pérou, pour rencontrer les membres de Cenca et échanger sur des pratiques d’accompagnement des femmes en situations de vulnérabilités.
Bien que membres du Collectif Former pour Transformer, la communication entre nos deux partenaires s’est parfois avérée difficile du fait de nombreux paramètres : barrière de la langue, distance géographique, différences culturelles, etc.
Pour autant, les équipes de Cenca et Fedina ont su échanger sur les actions réalisées dans leur pays respectif pour répondre aux problématiques de mise en place de parcours d’empowerment des femmes (l’accompagnement de femmes victimes de violences domestiques par exemple). Une démarche similaire dans le processus de suivi des femmes victimes de violences est mise en oeuvre : les écouter, croire en leur témoignage, les persuader qu’elles ne sont pas coupables, mais bien victimes, et, surtout, qu’elles ne sont pas seules.
Afin de prévenir les violences subies, Cenca a proposé la mise en place d’un outil utilisé avec les femmes de Mariátegui : le violentomètre. Après un échange sur les facteurs freinant le développement de l’empowerment des femmes, chaque organisation a construit son propre violentomètre. Celui-ci s’est révélé très différent pour chacune d’elle ! Fedina a classé les violences subies de manière chronologique dans la vie d’une femme, de la naissance à l’âge adulte. Cenca, de son côté, a classé les types de violences les plus marquantes dans le processus d’empowerment, aux violences les plus ordinaires subies par certaines péruviennes. Ensuite chaque organisation a partagé ses actions pour les combattre.
Les femmes accompagnées par Cenca et Fedina font face au même phénomène global tout au long de leur vie : la violence patriarcale. C’est son caractère systémique qui la rend particulièrement difficile à combattre.
Ce voyage aura permis d’échanger sur l’interculturalité, la volonté de poursuivre ces dynamiques au sein du Collectif Former pour Transformer et de se renforcer mutuellement.
Au terme de cette semaine riche en apprentissage, Fedina et Cenca ont exprimé le souhait de s’inspirer des pratiques et des dynamiques de l’autre pour avancer, ensemble, vers la transformation sociale en Inde et au Pérou.
Habla Causa : Sensibiliser à l’égalité des genres
Comme de nombreuses péruviennes accompagnées sont victimes de violences domestiques, sensibiliser les hommes à la déconstruction des stéréotypes liés au genre s’est imposé. Ainsi, le programme de formation « Habla Causa » a été créé dans le but d’instaurer des environnements familiaux plus égalitaires et plus sûrs. Destiné aux proches des femmes du projet « Habla Mujer », ces groupes de parole visent à promouvoir les masculinités positives et à déconstruire les normes traditionnelles, et nocives, de la masculinité. Les participants, tous volontaires, s’interrogent sur les rapports de domination liés au genre et proposent des comportements favorisant l’égalité hommes – femmes. « Habla Causa » permet d’engager pleinement les hommes dans l’émancipation des femmes.
RWANDA & SÉNÉGAL
L’alphabétisation comme source de libération
Au Sénégal, nous agissons en milieu rural et urbain auprès des paysans de la région de Thiès et des jeunes de Dakar. L’objectif : améliorer leur situation socioprofessionnelle et de les rendre moteurs du développement de leur territoire.
L’Union des Groupements Paysans de Meckhé (UGPM) a poursuivi la formation de 200 personnes en alphabétisation en wolof. Des bibliothèques ont ensuite été créées dans les villages. Marie Bouret, responsable du Pôle Form’action de Frères des Hommes, a travaillé sur la mise en place de ces bibliothèques villageoises aux côtés d’Assane Dieng, responsable Alphabétisation de l’UGPM. Elle nous explique : « L’objectif de ces bibliothèques est qu’après des formations en alphabétisation, les villages puissent continuer à proposer des animations autour de la lecture, de l’écriture, et valoriser les savoirs locaux ancestraux et la langue wolof. »
Par ailleurs, les 10 nouveaux groupements intégrés en phase 2 du projet ont tous été formés à des techniques de développement du leadership et à la citoyenneté.
Dans le but de renforcer l’autonomisation, les leaders de chaque groupement ont suivi une formation en gestion administrative et financière
Le fonds participatif
Dans la région de Thiès, le fonds participatif, initié par le Collectif Former pour Transformer, a soutenu des actions de lutte contre la malnutrition infantile.
Une journée de formation sur la préparation des repas a été proposée à 40 femmes de différents villages. L’accent a notamment été mis sur la fabrication d’une farine améliorée pour les enfants, l’apport nutritionnel des produits locaux et la nécessité d’une bonne hygiène. Ces femmes ont ensuite partagé leur apprentissage dans leur village respectif. Cette action aura permis à plus de 500 enfants de sortir de la malnutrition !
La transmission de paysan à paysan
Dans la Province du Sud du Rwanda, le projet Récasé mené avec nos partenaires Duhamic-Adri et Adenya vise à renforcer le pouvoir social et économique des paysans en situations de vulnérabilités.
En 2023, Récasé a été marqué par de nouvelles initiatives : la distribution de kits de semences potagères a permis à 32 champs collectifs et 465 jardins agroécologiques de voir le jour. 279 paysans ont été formés à de nouvelles techniques d’élevage.
Afin de toucher une population plus jeune, 657 élèves ont été sensibilisés à l’agroécologie au sein des écoles, dont certaines ont mis en place des jardins potagers. Le projet ne se limite pas aux formations agricoles. 843 paysans ont bénéficié d’une formation d’alphabétisation en kinyarwanda par 25 paysans formateurs choisis comme relais.
Outre l’agroécologie et l’alphabétisation, le projet Récasé met l’accent sur l’égalité des genres à travers 3 journées citoyennes organisées autour de la journée internationale des droits des femmes (8 mars). Plus de 500 membres des organisations communautaires ont ainsi été mobilisés pour l’événement.
RD CONGO et sénégal
Se former pour s’émanciper
De longue date, la formation est centrale dans nos actions.
En République Démocratique du Congo, dans le cadre d’un projet de 3 ans terminé en décembre 2023, l’Association pour la Promotion de l’Entrepreneuriat Féminin (APEF) et Frères des Hommes se sont mobilisés pour l’émancipation et l’empowerment social, économique et politique des femmes de Bukavu, dans l’Est du pays.
En 2023, pour la cinquième et dernière promotion du projet, 43 femmes ont été diplômées en coupe-couture et 29 en alphabétisation en swahili. Dans un objectif d’insertion professionnelle, un kit d’installation leur a été remis après leur certification. Elles ont également pu bénéficier d’un accompagnement à la création et à la gestion de microentreprise de coupe-couture. Ensuite, les femmes ont suivi des formations émancipatrices sur le genre, la gestion de conflit ou encore les droits des femmes. De plus, 30 hommes ont été conscientisés à l’égalité des genres grâce à des cercles de parole sur les masculinités positives.
Au Sénégal, le projet FAJA, pour Formation et Autonomisation des Jeunes Apprenti.e.s, conjointement mené par Frères des Hommes et l’ONG Concept depuis 3 ans, est arrivé à son terme en janvier 2024. Ce projet a permis une amélioration significative de la situation sociale et professionnelle de jeunes apprentis artisans des communes de Grand Yoff et de Parcelles Assainies, au Nord-Est de la capitale. 90 jeunes femmes et hommes ont bénéficié de formations professionnalisantes en menuiserie, coupe-couture, restauration ou en mécanique notamment. En 2023, ces jeunes âgés de 16 à 35 ans ont finalisé leur formation en alphabétisation et ont tous suivi des formations en informatique ; 18 seront bientôt officiellement certifiés dans leur domaine respectif. En fin de formation, les jeunes sont accompagnés dans l’obtention de leur carte professionnelle auprès de la chambre des métiers.
En République Démocratique du Congo comme au Sénégal, l’accompagnement ne se limite pas aux formations professionnalisantes et à l’entrepreneuriat. Le projet intègre un réel parcours d’autonomisation, de l’alphabétisation aux notions de citoyenneté, aux problématiques de genres et aux droits sociétaux, à l’hygiène et la sécurité dans le cadre de leur métier.
Ainsi, le suivi des personnes en situations de vulnérabilités vers l’émancipation se veut global.
HAÏTI ET BOLIVIE
La résilience face au réchauffement climatique
Depuis janvier 2023, le projet Ranfo Lavi Peyizan, mené en Haïti avec le Mouvement Paysan Papaye (MPP) et l’association Gradimirh est entré dans une nouvelle phase. En dépit d’une crise politique et climatique ainsi qu’un contexte économique et social compliqué marqué par l’inflation et l’insécurité, les actions prévues ont pu être initiées.
Axé sur l’autonomisation des collectifs de paysans et de jeunes citoyens dans le développement des activités agricoles et la sensibilisation à la protection de l’environnement, l’objectif du projet est de les encourager à s’investir durablement dans le développement et la transformation de leur territoire.
Un module de formation sur la déconstruction des stéréotypes d’âge et de genre a été coconstruit entre Frères des Hommes et son partenaire local à destination des paysannes et des paysans.
Parmi les 53 groupements accompagnés, 47 ont développé leurs activités (élevage, cultures vivrières ou cultures maraîchères) et 20 ont instauré des systèmes d’économie solidaire entre leurs membres.
Tout au long de l’année, les comités citoyens ont organisé des sessions de formation sur la préservation de l’environnement et la gestion des déchets plastiques. Une réflexion sur les moyens de lutter contre les troubles de la paix publique, représentant une réelle menace pour la communauté, a aussi été initiée. Ces premières actions citoyennes ont mobilisé plus de 500 villageoises et villageois.
Le MPP a organisé un camp d’été autour des enjeux d’agroécologie et de souveraineté alimentaire face aux dérèglements climatiques auquel 40 jeunes ont participé. D’autre part, six nouveaux comités de jeunes citoyens ont été créés afin de mettre en oeuvre des actions concrètes contre l’exode rural de la jeunesse.
Frères des Hommes s’engage en Bolivie !
Caractérisée par le Buen Vivir (Bien vivre), IPTK, pour Instituto Politécnico Tomás Katari (Institut Polytechnique Tomás Katari), est une ONG bolivienne née en pleine dictature militaire d’Hugo Banzer (1971 – 1978) et qui, dès sa création, s’est affirmée en faveur de la démocratie et contre le pouvoir en place.
Frères des Hommes et IPTK partageant les mêmes valeurs de solidarité et une détermination commune à soutenir les personnes subissant des injustices, Marie Bouret et Caroline Kientz – respectivement responsable du Pôle Form’action et responsable du développement des partenariats –
se sont rendues en Bolivie afin de concrétiser la collaboration.
Le projet d’un an débuté en novembre est à destination de 80 femmes et 70 hommes de la municipalité d’Ocurí, dans le Sud-Ouest de la Bolivie. Il vise à renforcer, via la formation, le leadership des associations et organisations de femmes, des organisations sociales paysannes autochtones, des étudiants et des élus.
L’objectif étant de promouvoir la démocratie populaire à travers ces 150 leaders issus de différents secteurs et de les encourager à devenir acteurs de transformation sociale.
Former pour transformer
La participation des populations
Du 17 au 21 avril, le Collectif Former pour Transformer s’est réuni à Paris à l’occasion de son séminaire annuel.
Ce fut l’occasion d’échanger sur la rédaction de la charte de gouvernance régissant l’organisation et l’orientation générale du Collectif. Une réflexion collective a été menée sur les 6 priorités pour la transformation sociale, l’accompagnement des populations, la mise en oeuvre de nos actions et leur impact.
Cette semaine de collaboration a permis au groupe de travail sur la participation des populations de présenter les actions réalisées dans le cadre du fonds participatif. Celui-ci vise à soutenir des besoins identifiés par et pour les personnes en situations de vulnérabilités, afin de les impliquer dans le changement social.
Le fonds a permis la formation d’artisanes péruviennes à des techniques de production et de marketing par leurs pairs. Au Sénégal, des villageois ont créé une pépinière pour reboiser leur territoire. En RDC et au Rwanda, confrontés aux problématiques d’accès à l’eau, des sources ont été réhabilitées. Des paysans congolais ont aussi pu construire un pont facilitant l’accès aux champs et la circulation du bétail.
L’objectif étant d’identifier les forces et les faiblesses des dynamiques participatives, des questions sur l’engagement, l’accompagnement et les obstacles à la participation des personnes victimes d’inégalités aux actions ont été soulevées. Principaux freins identifiés ? Le manque de confiance en soi et les niveaux hétérogènes de prise de conscience des problématiques.
Davis, directeur de Cenca, revient sur le séminaire, temps fort pour le Collectif : « On a réussi à trouver notre propre vision de la transformation sociale, ce qui n’est pas facile avec notre diversité, mais c’est ce qui fait finalement notre force »
En France : des initiatives citoyennes
L ’année 2023 a été marquée par l’engagement de Frères des Hommes dans la transformation sociale en France.
À Paris, les bénévoles de la Pépinière de la Solidarité et nos salariées ont coconstruit des initiatives citoyennes avec 18 jeunes primo-arrivants scolarisés en classe passerelle du Centre social Espace Torcy, dans le 18ème arrondissement. En s’appuyant sur les formations citoyenneté de Concept à Dakar, 3 actions ont été menées : une distribution alimentaire aux sans-abris de La Chapelle, un match de football avec les habitants du quartier et un « goûter-jeux » visant à fédérer les familles et les étudiants du Centre social autour de la langue française.
À Lille, c’est avec Utopia 56 – association de soutien aux personnes exilées accueillant des mineurs non accompagnés (MNA) – que nous avons conduit notre action : la réalisation d’un film retraçant la trajectoire de vie et la situation des jeunes.
Si, d’avril à juillet, l’équipe s’est réunie chaque semaine pour travailler sur le projet, celui-ci n’a pu aboutir du fait du changement de lieu de résidence de 3 jeunes. Malgré ce contretemps, l’expérimentation aura renforcé l’empowerment des jeunes, véritable dessein de l’action.
La préparation des activités a permis aux participants de travailler, discuter et réfléchir ensemble, surmontant les difficultés en français. Si les actions peuvent sembler modestes, elles ont contribué à une meilleure connaissance de soi et une plus grande implication des jeunes aux dynamiques solidaires ; c’est en ce sens que l’on parle de changement social. Comme l’explique un jeune : « Ces actions m’ont inspiré, j’ai envie de continuer à faire des actions ». Une expérience humaine également riche pour les bénévoles : « J’ai appris avec satisfaction qu’après le match, ils jouaient au foot tous les jours avec les gens du coin. Finalement il y avait une dimension de transformation sociale dans cette action. Au début, j’avais du mal à la voir. » témoigne un bénévole parisien.
Le programme 2024 :
Actions !
