Haïti, les paysans en force (collective)

Consolider la force collective des paysans dans le centre d’Haïti, voilà ce que propose le nouveau projet du Mouvement paysan Papaye (MPP) et de Frères des Hommes.

Permettre aux paysans de vivre dignement de leur terre, les conscientiser, les accompagner dans leur organisation, c’est le but du Mouvement paysan Papaye en Haïti. La formation joue pour cela un rôle essentiel. Deux types de formation sont menés par le mouvement paysan. Une, technique, en agroécologie pendant 10 mois, et une en « animation du changement social » : pendant 6 mois, des paysans sont initiés au fonctionnement des systèmes économiques et politiques, nationaux et internationaux et à la situation agricole en Haïti. Ils vont aussi apprendre à comment s’organiser en collectif ou « groupement ». Plusieurs dizaines de paysans ont été formés et 65 nouveaux groupements [1] ont été créés pendant les quatre ans d’un précédent projet mené entre 2014 et 2018 par le MPP et Frères des Hommes.
Une fois formés les paysans deviennent des « acteurs-relais ». Ils s’engagent alors dans la mobilisation, l’organisation et l’accompagnement d’autres paysans sur le terrain : chaque animateur/animatrice s’engage à constituer ou accompagner 5 groupements paysans et chaque agroécologiste formé s’engage à animer une brigade agrosylvicole (BAS) [2] et à accompagner une famille paysanne voisine.


Visite d’une famille paysanne par un agronome du MPP (tout à droite sur la photo)

Mêler le « technique » et le « politique »

Que se passe-t–il après ces formations ? Comment ces "acteurs-relais" s’impliquent-ils dans la militance pour le MPP ? Depuis plusieurs années, le mouvement avait noté chez certains des difficultés à se mobiliser dans le mouvement, privilégiant parfois un projet personnel grâce aux nouvelles compétences acquises. Frères des Hommes va mettre son savoir-faire en formation au service du projet et accompagner la mise en place d’un mécanisme de suivi « post-formation ». L’idée est de mieux accompagner ces acteurs dans leur relation avec les paysans, de les conseiller, de mieux les entourer et aussi d’être plus près de leurs besoins économiques et sociaux. L’autre enjeu du nouveau projet va être de reconnecter la « base » du MPP (constituée des paysans membres du mouvement) avec l’équipe centrale du MPP (eux-mêmes issus de cette base paysanne) en adaptant davantage le mode d’organisation du mouvement aux attentes des paysans.
Enfin, le dernier objectif est lié aux deux manières dont le MPP conçoit le collectif. La première vise à ce que le paysan acquiert une conscience politique, ce dernier se mettant ensuite au service du collectif. L’autre approche est plus technique et favorise l’entraide et l’apprentissage, le collectif se met alors au service des individus. Ces deux approches irriguent en permanence le mouvement paysan mais se « croisent » rarement, se faisant même parfois concurrence. C’est à la nécessité de construire des espaces communs, où se retrouvent le « technique » et le « politique » que notre nouveau projet va répondre.


Réunion d’un "groupement" du Mouvement paysan Papaye

[1Composés d’une dizaine de paysans, souvent voisins, ils façonnent l’entraide paysanne dans la campagne haïtienne, là où les paysans avaient tendance à s’isoler

[2L’objectif de ces brigades, composées de 10 à 15 paysans du même voisinage, est d’aménager les terres en commun contre l’érosion des sols et d’augmenter la fertilité des sols