« Être très flexible et à l’écoute »

Dès les premières mesures de confinement, le risque était bien réel que la crise sanitaire suspende définitivement les actions avec les populations et menace les structures de nos organisations partenaires. Frères des Hommes a voulu leur permettre de se mobiliser localement sur des actions d’urgence et leur garantir une stabilité dans le temps. Caroline Kientz, chargée de projets, et Léa Rouillon, chargée de formation, ont été pendant les premiers mois de la crise au cœur de l’effervescence.

Quelle a été la réponse de Frères des Hommes quand la crise sanitaire a débuté ?

Caroline Kientz : Vis-à-vis des partenaires, la posture était d’être dans l’adaptabilité. Nous voulions les assurer de la continuité des actions, notamment en leur proposant d’utiliser les ressources humaines prévues à l’origine dans les projets pour qu’ils mettent en place des actions d’urgence. Ça a été par exemple le cas au Pérou où les activités du projet étaient suspendues. Les salaires de l’équipe ont quand même continué à être versés pour permettre la mise en place d’une distribution alimentaire dans une banlieue de Lima très touchée par la crise. Partout les partenaires ont pu maintenir leur équipe. Il y a eu beaucoup de dialogue. On s’est adapté aux contraintes.

Quel était le risque quand les formations se sont arrêtées ?

Léa Rouillon : Leur arrêt signifiait le risque d’exclure celles ou ceux qui y participaient avant le confinement et d’interrompre la dynamique de changement social. Par exemple en Inde, tout d’un coup, pendant plusieurs mois, ces formations n’ont plus eu lieu. Les femmes des quartiers populaires qui les suivaient, potentiellement exposées à la violence de leurs maris, n’ont plus eu ces temps dans lesquels elles parlaient de leur vie privée ou professionnelle. Le risque était que les organisations partenaires ne les revoient plus.

Y avait-il un risque financier pour les partenaires ?

CK : La majorité d’entre eux ont des modèles économiques relativement fragiles, trois mois d’arrêt des projets auraient pu fragiliser les équipes intervenant auprès des populations. Il y avait un risque que nos partenaires soient contraints de laisser partir les salariés, or ce sont eux qui mènent les actions. Frères des Hommes en avait conscience et cela a motivé la mise en place d’un fonds de solidarité.

Quelle était l’idée dans la création de ce fonds ?

CK : L’idée était de leur permettre de prendre en charge leurs équipes, de continuer à fonctionner. Ils nous ont fait remonter leurs préoccupations, nous nous en sommes saisis. Nous avons beaucoup échangé avec l’Agence française de développement, notre bailleur, pour prolonger les projets jusqu’à fin octobre. Ces prolongations ont été possibles grâce aux fonds propres de Frères des Hommes. L’idée était aussi de permettre aux partenaires de reprendre leurs actions à la sortie des différents confinements, de leur donner un minimum de solidité, de réduire le risque, dont parlait Léa, que les organisations partenaires perdent le contact avec les populations.


Caroline Kientz et Gérard Bizimana, animateur au sein du projet "Récasé" au Rwanda