Des formations aussi bien techniques que conscientisantes
En RD Congo, notre partenaire l’APEF agit depuis plus de vingt ans pour l’émancipation des femmes et jeunes filles de Bukavu. Comme le dit Ludivine, notre Volontaire de Solidarité Internationale auprès de l’APEF depuis mai 2021, « on ne veut pas que leur donner un bagage technique mais aussi citoyen, on va aborder le droit du travail, le genre, le planning familial, la gestion de conflit, le marketing… »
Il s’agit en effet de construire des formations qui donnent aux femmes les moyens de s’émanciper tant économiquement (en apprenant un métier et en commercialisant leurs productions artisanales), que socialement et politiquement. Le gain d’estime de soi est capital dans les différentes formations proposées par notre partenaire. Qu’il s’agisse de la formation en coupe-couture, comme de la formation en alphabétisation en Swahili, les animatrices et animateurs engagent pour chaque module de nouvelles réflexions chez les apprenantes. Ludivine nous parle par exemple du stage de fin de formation à la coupe-couture : « Pendant le stage on essaie d’aborder d’autres thématiques et les faire coudre autre chose que des vêtements, on veut leur faire exprimer leurs émotions à travers la couture, et ça pousse à leur créativité. Chaque semaine, il y a une thématique différente. »
Le centre de formation de l’APEF est un espace de liberté d’expression et d’émancipation des femmes de Bukavu. Kombera Kashosi Ombeni a suivi une formation à la coupe-couture à l’APEF en 2021, elle témoigne : « Ce qui m’a beaucoup marqué pendant la formation, ce sont les formations émancipatrices que nous recevions. Cette formation a changé notre mentalité et nous amène à devenir des vraies actrices de notre propre développement. »
Atelier de coupe-couture à l’APEF (Bukavu)
L’émancipation des femmes avec les hommes
De manière à ce que cette émancipation puisse pleinement s’établir, l’APEF a mis en place des formations à la « masculinité positive », pour impliquer davantage les familles et proches des apprenantes dans leurs formations. Pour Ludivine, comme pour l’APEF et Frères des Hommes, « si on ne sensibilise pas les hommes, l’émancipation des femmes est compliquée. On a besoin de tout le monde pour faire une transformation sociale, il faut que tout le monde y participe. »
Déconstruire les stéréotypes de genre, repenser le planning familial et de fait la place des femmes dans les foyers, c’est encourager à une plus grande reconnaissance des rôles des femmes dans la société congolaise. Jeanne M’Mirindi a suivi une formation d’alphabétisation à l’APEF et témoigne « Mon mari a compris l’importance de se marier légalement et don civilement. Nous étions en concubinage depuis plus de 15 ans. Mais après la formation, il est venu me voir et m’a proposé de me marier légalement et de payer à ma famille la dot. » Ludivine explique par ailleurs que l’idée de ces formations à destination des maris et tuteurs des apprenantes est venues de ces dernières : « Ce sont les femmes qui nous ont demandé d’aborder ce sujet avec les hommes suite à leur formation sur leurs droits, parce qu’elles ne se sentaient pas écoutées par leur mari. Elles savent que le mariage civil est important pour qu’elles soient reconnues en cas de décès de leur mari, pour leurs enfants aussi, pour les héritages… »
« On s’occupe de leurs enfants pendant qu’elles s’occupent de leur futur »
Au-delà des formations dispensées par l’APEF, notre partenaire est conscient des contraintes réelles qui peuvent apparaître comme des obstacles difficiles à surmonter pour les femmes apprenantes : « Nous avons une garderie pour les enfants des apprenantes, témoigne Ludivine. Les femmes qui ont des enfants en bas âge peuvent les amener et les laisser à la garderie, qui a été créée pour encourager les femmes à ne pas se sentir empêchées. On a voulu leur dire qu’on s’occupe de leurs enfants pendant qu’elles s’occupent d’elles, de leur formation et de leur futur. » Ce dispositif permet en effet aux femmes de se concentrer sur leur avenir le temps de leur formation, « ça me permettait de respecter le programme de la journée » témoigne par exemple Kombera Kashosi Ombeni.
C’est en fait tout l’entourage des femmes formées par l’APEF qui est impliqué dans leur formation. Durant les périodes de formation et de stage, chaque mois les animatrices se rendent au domicile des apprenantes pour faire un état des lieux, voir comment peuvent s’appliquer les acquis des formations émancipatrices, si les femmes sont plus ouvertes et entendues au sein de leurs familles. Cette attention particulière portée à l’environnement quotidien des femmes et jeunes filles formées est primordial pour la réussite des formations et l’émancipation réelles des apprenantes !